
Avec finesse, et tout en délicatesse, le groupe Zebda brosse le portrait de la société française dans le nouvel album "Second tour". À coup de rimes et de mélodies entraînantes, les artistes évoquent leurs illusions, parfois leurs désillusions, revendiquent l'engagement citoyen et la solidarité tout en dénonçant le racisme et les préjugés. Rencontre avec Mouss, le chanteur du groupe.
Après un break de huit ans, ça vous fait plaisir de remonter sur scène ? Mouss : "On n'a jamais arrêté la scène avec mon frère Hakim. Par contre, ce qui nous a manqué, c'est d'être tous ensemble sur scène. Là, on est heureux de reformer le groupe ! On a envie de proposer nos chansons à notre public !"
D'ailleurs, vous sentez que votre public a mûri avec vous depuis vos débuts dans les années 90 ? Mouss : "Oui, il y a des gens qui ont grandi avec nous. Mais, nous n'avons pas un public uniforme. Nous avons rencontré d'autres personnes sur notre chemin au fil du temps. Aujourd'hui encore, des jeunes nous découvrent. C'est agréable et intéressant de s'adresser à un public varié où il y a une vraie mixité."
Avec "Second tour", on est bien loin de l'univers festif de la chanson "Tomber la chemise" ? Mouss : "C'est cette chanson populaire qui nous a fait connaître. Nous sommes donc fiers de "Tomber la chemise"; après, c'est sûr, il ne faut pas que ce soit réducteur. Nous, on aime aborder dans nos chansons des questions sur la politique et la société. On fait de la poésie sociale tout en légèreté, avec un peu d'humour. Finalement, on reste dans la tradition française comme Brel, Brassens. Mais en tant qu'enfants de l'immigration, on a ce besoin de décrire avec justesse les faits de société tout en analysant son évolution."
Justement de votre point de vue, comment la société a-t-elle évolué ? Mouss : "Certaines choses ont empiré. Dans les années 90 et même plus tard, on avait des espoirs. Mais, les gouvernements de droite ont démonté notre modèle solidaire et ont mis à mal notre service public à la française. On ne croit pas en la mixité évangélique mais il faut faire des efforts ! Le groupe Zebda a le privilège d'avoir la parole alors nous partageons nos ressentis. On se sent utiles. C'est pour ça qu'on avait écrit en 1995 "Le Bruit et l'Odeur", suite à un discours raciste de Jacques Chirac. C'est aussi pour ça qu'on avait créé un parti politique lors des municipales en 2011, nommé "Motivé-e-s". Nous, on est toujours motivés ! Il faut amener une certaine dynamique, au service des gens."
"Second tour" signifie qu'il n'y aura pas de suite à cet album ? Mouss : "On a fait un break entre deux chapitres de notre vie. Mais il n'y a jamais eu de rupture entre les membres du groupe. C'est juste qu'on voulait faire d'autres choses : animer une émission de radio, faire des albums en solo, ou écrire des livres. Aujourd'hui, on a envie de réaliser plein d'autres albums ensemble ! On est très heureux de notre retour et on va en profiter longtemps !"
> Retrouvez le groupe Zebda en concert vendredi 5 octobre à 20H30 au théâtre de Mende. Réservations au 04 66 94 00 23.
Propos recueillis par Anne-Marie Vincent Photo : Ulrich Leboeuf |